« Quel intérêt de monter un projet de ville aussi coûteux pour n’accueillir qu’à peine 1% de la population espérée? En tout cas, Masdar a le mérite d’être une ville 100% écologique et qui répond aux enjeux climatiques actuels. »
Corentin Greuez
Géographe/Urbaniste Consultant – Staff Planète
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Quel est le point commun entre le développement durable et les rois du pétrole ? Aucun, à première vue. Pourtant, il existe aux Emirats Arabes Unis une ville 100% écologique en plein milieu du désert. Trop beau pour être vrai ?
Cette ville, c’est Masdar, « la source » en arabe. Construite en 2008 pour la modique somme de 18 milliards de dollars, Masdar est en contraste total avec la capitale Abou Dhabi, située à deux pas : ses rues étroites et ombragées permettent de s’abriter de la chaleur assommante, on s’y déplace en véhicules électriques autoguidés qui ne dépassent pas les 20 km/h, et les immeubles n’ont ici pas les énormes baies vitrées caractéristiques de la région afin de conserver la fraîcheur à l’intérieur de murs… Le plus gros challenge ici est bien d’éviter la chaleur plutôt que d’en faire.
Pas de surprise non plus au niveau de la production d’électricité : une centrale photovoltaïque de 100 mégawatts (de la taille de 285 terrains de football !) alimente la ville, et chaque bâtiment possède ses propres panneaux solaires. L’eau provient quant à elle de sources salées et est ensuite adoucie. Des capteurs contrôlent l’allumage des lumières, et l’ouverture des robinets dans toute la ville, permettant ainsi de diminuer de moitié la consommation de ses habitants.
Cette ville futuristique semble tout avoir pour être l’exemple à suivre dans les décennies à venir pour combattre le changement climatique. Mais il lui manque une chose : des habitants. Cet oasis d’une vingtaine de milliards de dollars n’accueille en effet qu’un peu plus de 500 personnes, non pas par manque de place, mais parce que seules quelques centaines d’étudiants semblent vouloir y vivre/travailler. On est donc loin des 50 000 habitants et 1500 entreprises annoncées lors de lancement du projet.
Pourquoi ce manque d’engouement ? Manque de vision, mauvais emplacement, manque d’accessibilité,… les hypothèses sont multiples. Un chose est sûre, cependant : cet échec n’aura pas servi à rien, car la ville d’Abou Dhabi commence d’ores et déjà à appliquer les mêmes principes pour limiter son empreinte carbone et ces pratiques s’étendront bientôt sur tout le territoire. Les rois du pétrole vont-ils devenir les rois du solaire ?
Auteur: Eddy Delcher
Publié le 1er Juin 2015
Disponible sur le site Néoplanète
Photo à la une: Néoplanète – 01/06/2015